Les maladies du pancréas, comme le diabète ou le cancer du pancréas, sont généralement graves et ont un fort impact sur les patients. Malheureusement, il n’existe aujourd’hui aucun traitement spécifique ou efficace contre le cancer du pancréas, de sorte que le taux de survie des patients est très faible. Dans le cas du diabète, le développement de nouvelles thérapies de remplacement cellulaire pour les cellules productrices d’insuline semble être le futur traitement des patients insulinodépendants.
Malgré des années de recherche, on sait très peu de choses sur la grande complexité et la diversité des cellules qui composent le pancréas, en particulier les cellules du canal pancréatique, qui peuvent être à l’origine du cancer du pancréas. Cela rend difficile la mise en place de traitements efficaces ciblant les points clés des maladies de l’organe.
Cependant, si toutes ces cellules, leurs caractéristiques et la façon dont elles sont liées les unes aux autres étaient bien connues, nous pourrions mieux comprendre le développement de ces maladies et concevoir des traitements spécifiques pour améliorer la vie des patients, en particulier ceux qui souffrent d’un cancer du pancréas, dont la survie à 5 ans est inférieure à 10 %.
Dans ce sens, une étude réalisée par des chercheurs de l’Institut de Recherche Biomédicale de Bellvitge (IDIBELL) et de l’Université de Barcelone (UB), a décrit, avec une très grande précision, cellule par cellule, les cellules qui composent le pancréas et ses canaux.
Publié dans la revue Gastroentérologiele travail a été dirigé par le Dr Meritxell Rovira, chef du groupe de régénération pancréatique de l’IDIBELL, chercheuse au Département des sciences physiologiques de la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’UB (Campus de Bellvitge) et au Programme de traduction clinique de médecine régénérative de Catalogne (P-CMR(C)).
Les avancées obtenues grâce à cette étude posent les bases du projet que ce chercheur développe grâce au Programme d’Excellence CRIS 2023.
15 nouvelles populations cellulaires dans le pancréas
Le pancréas est à la fois une glande exocrine et endocrine. Sa fonction endocrine est de sécréter dans le sang diverses hormones, comme l’insuline et le glucagon, qui régulent la glycémie. En tant que glande exocrine, il sécrète, par son canal, du suc pancréatique vers le duodénum, qui contient du bicarbonate et des enzymes digestives.
L’équipe du Dr Rovira a réussi à identifier 15 nouvelles populations de cellules dans le pancréas, chacune d’elles ayant ses propres comportements et caractéristiques.
Selon le chercheur, « ces résultats sont très pertinents : ils peuvent constituer un excellent point de départ pour mieux comprendre comment se développent les maladies pancréatiques, comme le cancer du pancréas. De plus, nous avons observé que les cellules canalaires ont une grande plasticité en culture et pourraient être utilisées comme source de nouvelles cellules productrices d’insuline dans des cultures d’organoïdes pour les thérapies de médecine régénératrice du diabète. »
Rovira affirme que les données publiées jettent les bases de futures études qui étudieront le rôle des nouvelles populations de cellules des canaux pancréatiques dans la régénération de l’organe et la pathogénèse de sa fonction exocrine. « Si nous savons comment une maladie se développe », ajoute Rovira, « nous pouvons concevoir des thérapies meilleures, plus précises et plus personnalisées contre elle ».
Analyse cellule par cellule
Les résultats de l’étude ont été obtenus à partir de cultures d’organoïdes (ou de mini-organes tridimensionnels), de modèles de lésions exocrines et d’échantillons de cancer du pancréas. Pour examiner l’expression génétique des cellules individuelles, la technique scRNA-seq (transcriptomique à cellule unique) a été utilisée, qui permet de mesurer simultanément la concentration d’ARN de milliers de gènes dans chaque cellule.
Grâce à ces approches expérimentales, il a été possible de caractériser de manière exhaustive l’hétérogénéité canalaire de la souris à une résolution unicellulaire, depuis les cellules centro-acineuses jusqu’au canal principal du pancréas. Les chercheurs précisent néanmoins que de nouveaux modèles animaux sont nécessaires pour étudier les résultats obtenus in vivo et de manière plus approfondie.
La traduction de ces résultats à l’environnement humain permettrait, d’une part, d’identifier différentes cellules du canal pancréatique impliquées dans l’origine du cancer du pancréas et, par conséquent, de conduire à une nouvelle stratification des patients en fonction de marqueurs et d’identifier de nouveaux objectifs thérapeutiques.
D’autre part, les résultats obtenus dans les cultures d’organoïdes pourraient conduire à de futures thérapies de remplacement cellulaire pour le traitement du diabète.