Des scientifiques ont mené l’étude la plus vaste et la plus diversifiée à ce jour sur la façon dont les changements génétiques récessifs contribuent aux troubles du développement. Ils ont découvert que la plupart des cas non diagnostiqués dus à des causes récessives sont liés à des gènes que nous connaissons déjà, et suggèrent qu’un changement d’orientation de la recherche pourrait améliorer les taux de diagnostic.
Des chercheurs du Wellcome Sanger Institute et leurs collaborateurs de GeneDx ont analysé les données génétiques de près de 30 000 familles touchées par des troubles du développement, soit six fois plus de familles présentant une plus grande diversité d’origines ancestrales par rapport aux travaux précédents.
Après avoir découvert plusieurs gènes qui n’étaient pas liés auparavant à ces maladies, les chercheurs ont découvert que des gènes connus expliquent plus de 80 % des cas causés par des variantes génétiques récessives. Il s’agit d’une augmentation significative par rapport aux estimations précédentes. L’étude a également révélé que la contribution des variantes génétiques récessives aux troubles du développement varie considérablement selon les groupes ethniques étudiés.
Les résultats, publiés le 23 septembre dans Génétique de la naturejettent un nouvel éclairage sur les bases génétiques des troubles du développement et soulignent l’importance de prendre en compte le patrimoine génétique d’une personne dans le diagnostic et la recherche.
L’équipe suggère que les efforts déployés ces dernières années pour découvrir les gènes récessifs associés à ces troubles ont été largement couronnés de succès et que le défi consiste désormais davantage à interpréter les changements génétiques dans les gènes récessifs connus. Cette approche pourrait potentiellement être utilisée pour diagnostiquer deux fois plus de patients que si l’on se concentrait uniquement sur la découverte des gènes restants, affirment-ils.
De nombreux troubles du développement, qui peuvent avoir un impact sur le développement physique, intellectuel ou comportemental d’un enfant, ont des origines génétiques. Certains sont causés par des gènes récessifs, où un enfant doit hériter d’une copie altérée du gène de ses deux parents pour développer la maladie. Il s’agit notamment du syndrome de Joubert, du syndrome de Bardet-Biedl et de la maladie de Tay-Sachs. Jusqu’à présent, la quantification globale de ces causes génétiques récessives dans diverses populations n’a pas été réalisée.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont combiné les données résumées de l’étude Deciphering Developmental Disorders (DDD) et des cohortes GeneDx pour identifier des individus ayant des antécédents génétiques similaires, soit un total de 29 745 familles. Plus de 20 % de ces familles étaient issues pour la plupart d’ascendances non européennes. L’analyse de ce vaste ensemble de données a permis d’obtenir des informations plus précises, en particulier pour les groupes plus petits et moins étudiés.
L’équipe a constaté que le nombre de patients affectés par des variantes génétiques récessives variait considérablement selon les groupes d’ascendance, allant de 2 à 19 % des cas. Cette variation est étroitement liée à la prévalence des unions entre proches parents – la consanguinité – dans ces groupes.
Les chercheurs ont identifié plusieurs gènes, dont KBTBD2, CRELD1 et ZDHHC16, nouvellement associés à des troubles du développement, apportant des réponses à des familles jusque-là non diagnostiquées. Ils estiment également qu’environ 12,5 % des patients pourraient avoir plusieurs facteurs génétiques contribuant à leur état, soulignant la complexité de ces troubles.
Il est important de noter qu’ils ont découvert que les gènes connus expliquent environ 84 % des cas causés par des variantes génétiques récessives, ce qui était similaire chez les individus issus de groupes d’ascendance européenne et non européenne.
Cette augmentation substantielle par rapport aux estimations précédentes suggère que les nouveaux gènes récessifs qui ont été découverts au cours des dernières années représentent une fraction substantielle des patients non diagnostiqués auparavant avec des causes récessives.
Les scientifiques ont toutefois constaté que certains diagnostics liés à ces gènes connus ne sont probablement pas encore posés et qu’ils impliquent des modifications de l’ADN difficiles à interpréter. Ces résultats soulignent l’importance d’améliorer l’interprétation des variantes génétiques nocives dans les gènes connus pour être à l’origine de maladies.
Le Dr Kartik Chundru, premier auteur de l’étude, anciennement au Wellcome Sanger Institute et maintenant à l’Université d’Exeter, a déclaré : « Ces découvertes génétiques apporteront des réponses à certaines familles jusqu’alors non diagnostiquées et aideront les cliniciens à mieux comprendre et identifier ces conditions.
« Notre étude souligne l’importance de réanalyser les données génétiques avec des méthodes et des connaissances actualisées, car cela peut conduire à de nouveaux diagnostics pour les patients sans avoir besoin d’échantillons supplémentaires. »
Le Dr Vincent Ustach, auteur principal de l’étude chez GeneDx, a déclaré : « Il s’agit du groupe de participants le plus diversifié jamais étudié pour aborder la contribution récessive aux troubles du développement, et cela montre l’impact critique d’un ensemble de données diversifié pour offrir une compréhension plus complète des troubles du développement à travers différentes ascendances.
« Les résultats de cette étude peuvent générer des résultats plus personnalisés et exploitables pour les familles ayant des enfants touchés et, de manière générale, améliorer notre capacité à fournir des réponses aux populations sous-représentées. »
Le Dr Hilary Martin, auteur principal de l’étude au Wellcome Sanger Institute, a déclaré : « L’une des conclusions surprenantes de ce travail est que de nombreux patients ayant un diagnostic génétique connu pourraient en fait avoir des modifications génétiques rares supplémentaires contribuant à leur état.
« L’identification de ces changements supplémentaires pourrait améliorer notre compréhension de l’état du patient, conduire à des diagnostics plus précis et potentiellement offrir de nouvelles options de traitement. Cela met également en évidence la complexité des troubles génétiques et la nécessité d’une analyse génétique complète. »