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L'actualité vue par la cyberpresse par Emmanuel Meunier |
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Les stimulants et la "performance" | ||
L’usage d’amphétaminique par les étudiants est régulièrement évoqué. Le New York Times pointe de nouvelles dérives, en particulier lié à un usage abusif de médicaments amphétaminiques prescrit pour le traitement de l’ADHD (désordre hyperactif et déficit de l’attention) comme la Ritaline® ou l’Adderral®. Selon l’agence américaine IMS Health, entre 2000 et 2010, le diagnostic d’ADHD a augmenté de 66%, passant de 6,2 millions à 10,4 millions parmi la population américaine, dont 87% sont traités à l’aide de médicaments. En 2007, 9,5% des enfants entre 4 et 17 ans, soit 5,4 millions, étaient diagnostiqués avec ADHD selon le Centre de contrôle et de prévention des maladies. Les prescriptions délivrées aux jeunes adultes ont elles doublé entre 2008 et 2012 pour les mineurs et chez les 20-29ans. Non seulement des étudiants détourne ces médicaments pour un « dopant », mais quelques uns passe usage quasi-toxicomaniaque. Plus grave est le fait des médecins commencent à en prescrire à des élèves beaucoup plus jeune en difficulté scolaire. Les médicaments viennent compenser la détresse de familles, dans une "société incapable d’investir dans des approches non pharmaceutiques efficaces pour ces enfants et leurs familles". La logique est que s’il est trop coûteux pour la société de changer l’environnement de l’enfant en le rendant plus aidant, "alors [il] faut agir sur l’enfant".La logique de "performance" sexuelle est aussi au cœur de la pratique du slam, qui se développe dans le milieu festif gay [Voir "Drogue, performance et comportements à risques sexuels" in Réduction des risques - Actualité 2013 - 1er semestre]. |
Et avant que la MDMA (ecstasy) ne soit interdite aux USA et que l’usage du Viagra® ne se développe, un psychiatre californien, le docteur Andrew Shelgin, au début des années soixante-dix, prescrivait la MDMA, dont les effets empathogènes sont bien connus, pour traiter les problèmes de couple. Il n’est pas étonnant de constater que cette idéologie de la performance se retrouve dans les classes aisées. L’analyse des seringues collectées dans des récupérateurs en Ile-de-France par l'association Safe, montre la présence de molécule de 4-MEC (un dérivé de la méphédrone), dans 25 % des 3 244 seringues analysées en 2012. Les distributeurs les plus concernés sont ceux des Halles (41,29 %), de Bastille (57,38 %) et c’est dans le 16e arrondissement de Paris que sa présence est la plus spectaculaire : 81 % dans les seringues prélevées dans le récupérateur proche de la station de RER Kennedy. Dans le quartier, elle y aurait remplacé, auprès d'un public à la recherche de stimulants, pour des raisons festives ou professionnelles, la cocaïne, dont la présence dans les seringues est passée de 100 % à 37 % entre 2010 et 2012. "On peut penser que le profil des usagers reste le même, mais qu'ils ont changé leur façon de consommer en préférant des produits accessibles sur Internet", affirme Catherine Duplessy, la directrice de Safe et qu’ils préfèrent l’usage anonyme des distributeurs-échangeurs de seringues plutôt que d’en demander à leur pharmacien. Sources :14.02.13. blog.Rue 89. USA : les jeunes Américains accros aux stimulants ? 05.05.13. LesInrocks. L’ecstasy: le médicament du futur? (stress post-traumatique - entretien avec le Dr M. Mithoeffer, MAPS) 11.06.13. Le Monde. Interdite depuis 2012, la molécule 4-MEC se diffuse à Paris |
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Les Nouveaux produits de synthèse, legal highs, designer drugs, research chemicals : de nouvelles drogues faites avec de vieilles drogues | ||
On annonce régulièrement l’apparition de Nouveaux produit de synthèse (NPS) développées par des chimistes. Les trafiquants s’auréolent du prestige d’être des "créateurs", des "chercheurs". Il existe cinq grandes classes de « nouveaux produits de synthèse » : les phénéthylamines dont les structures chimiques se déclinent de celle de la MDMA (ecstasy), qui possèdent des propriétés stimulantes, empathogènes et plus ou moins hallucinogènes ; |
les cathinones qui dérive d’une substance naturelle psychoactive contenue dans la feuille de khat - cette famille regroupe plus de la moitié des NPS aux effets stimulants repérés depuis 2008 ; les pipérazines qui se déclinent de la BZP, un stimulant qui a été considéré comme alternative légale à l’amphétamine jusqu’au début des années 2000 et qui a été classé comme stupéfiant en France en 2008 ; les tryptamines qui décline de la DMT (diméthyltryptamine), molécule hallucinogène présente dans l’ayahuasca, plante utilisée dans la médecine chamanique ; les cannabinoïdes de synthèse qui imitent les effets du cannabis en se fixant sur les mêmes récepteurs que le THC et qui représentent près de la moitié des NPS qui apparaissent. Sources : |
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Les problèmes liés aux Nouveaux produits de synthèse (NPS) | ||
Les problèmes liés aux NPS sont tout d’abord lié à leurs conditions de fabrications et de distributions hors de contrôle et à l’absence d’informations fiables sur leurs effets, à court, moyen et long termes. Les NPS sont diffusés via Internet le plus souvent par des sites non référencés par les moteurs de recherche. On paie par carte de crédit, et les produits sont envoyés par colis postaux. Le client n’est pas assuré du pourcentage de produit actif pour déterminer une dose adapté (ce qui peut induire des surdoses, surtout si le produit se présente en poudre, le dosage étant en soi problématique puisque les balances au milligramme sont très imprécises en dessous d'une charge minimale). Il n’est pas assuré de la pureté des substances utilisées, ceux-ci étant fabriqués par des laboratoires chinois et indiens peu regardants. Il n’est même pas sûr que le produit contienne la molécule souhaitée, sans parler du fait que des sites pratiquent des "scam" (arnaques). La méconnaissance des effets est aussi problématique. Les symptômes les plus cités sont d’ordre sympathomimétique : hyperthermie, tachycardie, hypersudation, mydriase, sentiment de mal-être. Il peut également s’agir de manifestations psychiatriques : hallucinations, effets dissociatifs non recherchés ou symptômes de type paranoïaque. Quelques cas de décès ont été recensés. En Angleterre, une enquête auprès d’utilisateurs de méphédrone a révélé que 51% ont souffert de maux de tête, 43% de palpitations du cœur, 27% de forte nausées et 15% eurent les doigts gelés voir bleue. Avec la méthylone ou "M1" des utilisateurs rapportent des sensations de « fourmis dans le crane » persistante, de confusion mentale profonde, voir des amnésies, ayant nécessité des hospitalisations. |
A l'instar de la MDMA, beaucoup des NPS peuvent induire un "syndrome serotoninergique" (désordre potentiellement mortel de l'équilibre chimique du système nerveux central dû à un excès de sérotonine au niveau cérébral). Syndrome qui peut se traduire par des vertiges ("brainzaps") qui peuvent durer plusieurs jours, d'hypersensibilité aux images et au son, mais aussi d’accidents plus grave. Le risque est particulièrement important avec des mélanges, notamment avec des Inhibiteur de monoamine oxydase (IMAO - une classe de médicaments utilisés dans le traitement de la dépression). Aux États-Unis, des cas d’insuffisance rénale aiguë chez des sujets jeunes se présentant aux urgences et ayant consommé un cannabinoïde synthétique ont été enregistrés. Aucun n’avait de maladie rénale antérieure et aucun ne prenait de médicament néphrotoxique. Sur certains des lésions tubulaires aiguës ont été découvertes, quelque uns ont dû être dialysés et d’autres traités par corticothérapie. Sources :07.01.13. Psychoactif. Research Chemicals, effets, risques, témoignages 20.02.13. Quotidien du médecin. Cannabinoïdes synthétiques : 16 cas d’insuffisance rénale aiguë 11.06.13. LeMonde. Internet, supermarché des drogues de synthèse 31.01.13. OFDT. Tendances n°84. Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies. Nouveaux produits de synthèse et Internet. 07.12.12. 20 minutes. Métamphétamine: Les Etats-Unis lancent une campagne choc 28.12.12. Medscape. Overdoses aux nouvelles drogues de synthèse : un défi pour les réanimateurs |
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Les drogues de synthèse et la recherche | ||
La recherche médicale n’a jamais cessé de s’intéresser, même si c’est de manière marginale, à l’utilité thérapeutique de ces substances [Voir "Les drogues de synthèse et recherche" in Drogues de Synthèse - Actualité 2012 - 2nd semestre]. La Kétamine, baptisée "spécial K" ou "vitamine K" sur le marché illégal des hallucinogènes, est un anesthésiant vétérinaire qui peut provoquer un phénomène "dissociatif" (l’esprit "sort" du corps). Le Dr Carlos Zarate du National Institute of Mental Health de Bethesda (NIMH), dans le Maryland a testé des injections de faibles doses de kétamine à des patients dépressifs et constaté des améliorations significatives chez 71% des dix-huit patients ayant participé à l’expérimentation. Le Dr Markus Kosel, des hôpitaux universitaires de Genève (HUG), expérimente de même la kétamine sur des patients ayant des dépressions graves, dites résistantes à tous les traitements, psychologiques et biologiques. Avec des résultats mitigés, car après huit à dix jours, les patients rechutent. En 2010, une étude a testé un traitement de six injections sur douze jours. Les effets positifs durent alors dix-neuf jours en moyenne après la dernière injection, délai qui peut atteindre quarante-cinq jours.Entre 1954 et 1960, le LSD a servi à traiter des alcooliques, notamment au Canada [Voir "D'autres pistes de traitements" in Alcool - Actualité 2012 - 1er Semestre], sous l’impulsion d’un psychiatre britannique, Humphry Osmond, resté dans l’histoire être l’inventeur du terme psychédélique, pour avoir initié au LSD l’écrivain Aldous Huxley, auteur des Portes de la perception, en 1953. |
En 2010, Pr Franz Vollenweider (Suisse), a publié dans Nature, un article sur le traitement de traumatisme avec le LSD, ce produit psychédélique facilitant la réintégration de souvenir émotionnellement lourd. A Soleure, en Suisse, un psychiatre privé, Peter Gasser, a testé l’usage ponctuel de LSD sur des malades du cancer en phase terminale, pour voir s’il réduit leur angoisse face à la mort.La MDMA est expérimentée aux USA dans le traitement des syndromes de stress post-traumatique. D’après le Andrew Feldmar du MAPS, un laboratoire américain : "Les gens n’oublient pas sous MDMA. Au contraire, ils ont une vision plus précise de l’événement traumatisant. Après l’expérience, les gens s’en souviennent plus en détail. Ils en parlent plus clairement et se rendent compte qu’inconsciemment ils l’occultaient." Le Dr Peter Oehen explore la MDMA pour traiter des syndromes de stress post-traumatique, chez des patients ayant subi des abus sexuels dans l’enfance. Mais les résultats sont mitigés. Sources :15.03.13. Libération. Des essais stupéfiants (champignons hallucinogènes, LSD, kétamine pour soigner la dépression ?) 05.05.13. LesInrocks. L’ecstasy: le médicament du futur? (stress post-traumatique - entretien avec le Dr M. Mithoeffer, MAPS) |