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L'actualité vue par la cyberpresse par Emmanuel Meunier |
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Eléments d’histoires de la RdR (1) : avant 1990 | ||
La France été, en matière de RdR en retard sur nombre de ces voisins (en Grande-Bretagne où la réduction des risques a été conceptualisée en 1987, elle est instituée comme l’un des piliers de la politique des drogues dès 1990 en Suisse). Le rapport Pelletier (1978), première évaluation de la loi de 1970, date d’une époque où l’usage de l’héroïne ne s’est pas encore massifié et où la question de la santé publique est considérée comme négligeable : l’usage de drogues est considérée comme une déviance et comme un problème de police. A Paris, la "rue de la drogue" de Belleville, les passages de la rue du Faubourg-Montmartre, le quartier de la Goutte-d’Or, mais surtout l’îlot Chalon (près de la gare de Lyon) mobilisent l’attention des médias et des autorités. L’îlot Chalon, décrété insalubre par la préfecture de la Seine dès la fin de la première guerre mondiale, était constitué de vieux immeubles, de hangars, d’ateliers et de locaux industriels hérités du XIXe siècle et désaffectés. La SNCF y possédait des immeubles laissés à l’abandon. Premier "quartier chinois" de Paris durant l’entre-deux guerres (avec quelques petites fumeries d’opium clandestines), le quartier devient, après la guerre, Maghrébins (avec des petits trafics de haschisch), puis, à la fin des années 1960, un "quartier africain" avec une importante immigration sénégalaise. Les habitants luttent pour ne pas être les laissez pour compte d’une réhabilitation spéculative, sans rencontrer l’aide des autorités. |
Il en résulte un délabrement du quartier, qui va favoriser la venue des marchands de sommeil, la création de squats, des tensions sociales et intercommunautaires et l’apparition du racket des commerçants et du trafic d’héroïne. Au cours de l’année 1983, une part croissante des toxicomanes interpellés pour consommation ou trafic dans la capitale déclarent se fournir dans l’îlot : on rapporte que près de 20.000 personnes s’y approvisionneraient quotidiennement. L’îlot sera détruit en 1984 après des rafles policières, qui repousseront le trafic vers le Nord-Est parisien. |
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Eléments d’histoires de la RdR (2) : 1990-2005 | ||
En 1990, Médecins du monde ouvre le premier programme d’échange de seringues et en 1992, Asud (AutoSupport des Usagers de Drogues) est créé. Il faut attendre 1994, pour que la réduction des risques, à l’instigation de Simone Veil, ministre de la Santé, soit reconnue, mais à titre expérimental. En 1995, est expérimenté à Montpellier, par ASUD, une première salle d’injection, qui ne durera pas. |
Le rapport SIAMOIS (2001) constate que les usagers de drogues sont désormais reçus dans les services hospitaliers, qu’ils sont aussi régulièrement suivis par les médecins généralistes et dans les services de soins spécialisés pour la toxicomanie. L’accès aux soins se marque par une amélioration de la santé. Les usagers de drogues sont moins contaminés par le sida ; ils représentent aujourd’hui 14 % des contaminations par le sida contre quelque 20 % en 1992. |
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Eléments d’histoires de la RdR (3) : bilan et nouveaux défis | ||
Ni les médicaments de substitution, ni l’accès au matériel d’injection stérilisé, "ne suffisent à comprendre l’extraordinaire réussite de la réduction des risques entre 1994 et 2000", constate Anne Copel. "L’extraordinaire réussite de la réduction des risques en France tient à la façon dont les hommes se sont appropriés les outils –qu’ils soient usagers de drogues ou bien acteurs de prévention ou de soin. L’oublier, c’est réduire la réduction des risques à ses outils, médicaments ou seringues". Le succès fut lié à une démarche militante de la part de médecins, de pharmaciens, d’acteurs sociaux et au fait que "les usagers eux-mêmes ont accepté de devenir des patients. La transformation du toxicomane en patient n’a été ni simple ni immédiate ". |
Se rappeler que la RdR n’est pas réductible à des outils, est d’autant plus important, au moment ou celle-ci marque le pas : l’épidémie de VHC parmi les usagers reste importante, il existe des problèmes de mésusages des traitements de substitution (comme l’injection du Subutex®) et de nombreux défis comme d’aller à la rencontre de publics difficiles d’accès ou ayant d’autres usages que l’injection ou, encore, de contribuer à la régulation des consommations dans l’espace public. Source : 15.01.13. A-F-R. Histoire de la Réduction des Risques en France, par Anne Coppel, sociologue (publié dans Les Cahiers de l’Actif, n°310-311, mars-avril 2002, p11-22) |
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Salle d’injection à moindre risque (SIMR) : le projet strasbourgeois | ||
La création de salles d’injection à moindre risque, dans un cadre expérimental, confirmée par Marisol Touraine, Ministre des Affaires Sociales et de la Santé, le 23 juin 2012, à Solidays [Voir "Salles d'injection à moindre risque" in "Réduction des risques - Actualité 2012 - 1er Semestre"] a fait émergé des projets. Fin 2012, 4 projets était identifiés, sur les villes de Paris, Marseille, Bordeaux et Strasbourg [Voir "Etats des projets de SCMR" in "Réduction des risques - Actualité 2012 - 2nd Semestre"]. A la fin du premier semestre 2013, on en compte plus que deux : Paris et Strasbourg. Le projet strasbourgeois est porté par l’association Ithaque. Son diagnostique s’appuie sur le fait que 5000 Alsaciens bénéficient d'un traitement de substitution, que les pharmacies de la région délivrent 200000 seringues par an et l'association Ithaque 98000 Steribox® par an. |
L’association accueille chaque année plus de 3 000 personnes, soit au sein du Csapa, soit du Caarrud. Ithaque souhaite créer un lieu (13h à 20h, 7j/7), constitué de trois espaces, un pour l’accueil, un pour la consommation et un dernier pour la descente. Les usagers auront un entretien avec un travailleur social (déterminer les habitudes, types de consommations, pathologies éventuelles, etc) et montreront les substances qu’ils ont l’intention de consommer. Puis elles se dirigeront vers l’un des espaces dédiés. Le projet d’Ithaque prévoit 8 postes d’injection, 2 pour le « snif »et 4 pour l’inhalation. Dans tous les espaces, les toxicomanes utiliseront du matériel d’Ithaque, stérilisé et sûr, et seront sous la surveillance constante d’un infirmier. Il y aura également un médecin en permanence dans la structure. Ithaque prévoit 80 à 100 passages par jour et chiffre son projet à 500.000€ par an. |
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SIMR : le projet parisien | ||
Le projet parisien est porté par Gaïa et MdM. Son diagnostique s’appuie sur l’existence de longue date de scènes de consommation de drogue dans le Nord-Est parisien (gares du Nord et de l’Est, porte de la Chapelle, quartier de Stalingrad, jardins d’Eole, Goutte d’or…). Cela engendre des problèmes dans la vie des quartiers : usagers qui consomment dans les cages d’escaliers, les toilettes publiques, entre deux voitures, dans les lieux publics à la vue des passants et du voisinage ; comportement antisociaux ; violence ; matériel de consommation abandonné sur la voie publique, dans les halls d’immeuble. Les drogues les plus consommées et vendues sont le crack, les médicaments détournés de leur usage (Skénan®, Subutex®), l’héroïne et la cocaïne. En 2012, l’association Safe, gestionnaire des 2 automates autour de la gare du Nord, a distribué 200000 seringues dont 130000 au seul automate de la rue de Maubeuge. L’association Gaïa-Paris, qui gère un Caarud mobile dont l’antenne stationne rue de Maubeuge, reçoit 2200 usagers différents chaque année avec plus de 11000 passages. Quatre-vingts mille seringues et petit matériel d’injection sont délivrés sur ce site. Les urgences de l’hôpital Lariboisière délivrent à la demande des jetons pour obtenir un kit d’injection dans les automates, en 2011, 600 jetons étaient distribués par semaine, en 2012, c’est près de 1400 jetons par semaine. Les toilettes publiques du quartier, dites "sanisettes", sont utilisées comme lieux de consommation et les services du SMASH y ramassent plus de 5000 seringues par semaine. |
La population concernée (entre 3 à 5000 personnes) est constituée : |
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SIMR : désistement de Marseille et Bordeaux et opposition de l’Académie de médecine | ||
Il semble que l’approche des élections municipales et l’opposition de la droite ait contribué à se revirement. Patrick Padovani, adjoint au maire à la Santé (UMP) de Marseille, qui défend depuis longtemps l'idée d'une salle d'injection supervisée, regrette la lenteur gouvernementale : "Il faudrait que cela se fasse avant juin, après on sera trop près des aventures municipales" et "les gens vont dire que l'on a plus besoin d'une maternité par exemple". Le sénateur-maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin (UMP), s’est finalement désisté notamment en évoquant l’existence d’autres dispositifs de RdR sur sa ville et un flou juridique : "qui est responsable si une personne meurt à l'intérieur ou en sortant ? L'Etat ? La Ville qui a donné l'autorisation ? Je ne sais pas." D’un côté l’opinion publique n’est pas hostile au Salle d’injection comme en témoigne l'enquête d'opinion EROPP 2013 (Opinions des français sur les drogues). 58 % des personnes interrogées ont répondu positivement à la question : "Certains proposent de mettre des locaux et du matériel propre à disposition des consommateurs d'héroïne pour qu’ils puissent s'injecter hors de l’espace public, pour prévenir les risques d'overdose et limiter la propagation du sida. Êtes-vous tout à fait, plutôt, plutôt pas ou pas du tout d’accord avec cette proposition ?" Mais, une chose est d’accepter ce type de dispositif et une autre d’en avoir un installé près de chez soi. La droite dite "populaire" exploite les angoisses des riverains. Le patron des députés UMP, Christian Jacob a déclaré: "L'Etat va s'occuper d'organiser la consommation de stupéfiants. Et dans tous les pays, d'ailleurs, où ça a été réalisé, beaucoup de pays font marche arrière et partout, ça s'est traduit par une augmentation de la consommation." C’est "de l’empoisonnement assisté" a déclaré Valérie Pécresse. L’association de riverains "Vivre Gares du Nord et de l'Est" prédit une hausse de l’insécurité. Le 14 avril, une pseudo "votation" populaire autour de la question "Etes-vous favorable à l'ouverture d'une salle de shoot dans le quartier de la gare du Nord ?" a réuni 296 Parisiens dans un café parisiens. 16 ont voté pour, 280 se sont exprimées contre le projet, parmi lesquels nombres de militants et sympathisants UMP. |
L’Académie de médecine, qui s’était opposée à toute expérimentation sous le gouvernement Fillon [Voir "L’opposition aux « salles de shoot »" in "Réduction des risques - Actualité 2012 - 2nd Semestre"], se positionne en affirmant que le projet doit rester expérimental. Elle insiste sur le fait que pour attester de conditions de sécurité sanitaire, il faut pouvoir identifier le produit injecté (mais note, le Pr Ollié : "l'examen macroscopique de la substance avec laquelle viendraient les toxicomanes ne permettra pas de connaître la nature du ou des produits injectés", d’où la nécessité de tester les produits), qu’il y ait des garantie d’asepsie (or, note le Pr Olié, les "substances venues de la rue n'apporteront aucune garantie d'asepsie") et disponibilité des moyens de réponse aux urgences vitales consécutives à l'injection. D’autre part, l’expérimentation impose de satisfaire à certaines exigences éthiques et juridiques, ce qui suppose une méthodologie, des critères d'évaluation et un calendrier définis à l'avance, les personnes accueillies doivent bénéficier "d'une information éclairée sur les risques encourus et il faudrait recueillir l'expression de son consentement" et "les responsabilités des pouvoirs publics et des professionnels en cas de complication médicale voire d'acte délictueux commis sous l'emprise de la drogue doivent être définies". |
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RdR et VIH | ||
La RdR a fait ses preuves en matière de prévention du VIH comme l’atteste encore un article paru dans le British Medical Journal [MacArthur GJ, Minozzi S, Martin N et al. Opiate substitution treatment and HIV transmission in people who inject drugs: systematic review and meta-analysis. BMJ 2012 Oct 3;345:e5945], étude sous forme de méta-analyse qui montre l’efficacité de la méthadone à réduire les comportements à risque des usagers de drogues, en particulier en matière de transmission du VIH. Dans cette étude, les programmes de substitution diminuent de 54% le risque de transmission du VIH et c’est une donnée très importante. Une étude thaïlandaise de la Bangkok Tenofovir Study sur 2 400 hommes et femmes injecteurs séronégatifs thaïlandais a étudié l’impact des Prophylaxies pré-exposition (traitement préventif du VIH) en donnant à la moitié d’entre eux du Tenofovir et aux autres un placébo. Les participants prenaient quotidiennement leur dose sous surveillance médicale et recevait des conseils de réduction des risques, des aides sociales, des accès aux traitements méthadone… |
Après quatre années, le groupe qui recevait ténofovir comptait 17 personnes infectées, contre 33 pour le groupe qui recevait un placébo, soit un risque d’infection de 49 % moins élevé parmi les participants du groupe ténofovir. Il est observer que le nombre de nouveau cas d’infection à diminué dans les deux groupes au fil du temps, sans doute sous l’effet des conseils de réduction des risques et de l’accès aux soins. A la fin de l’étude, la proportion de personnes qui disaient s'être injecté au cours des trois mois précédents était passée de 63 % à 23 %, et le taux de partage d'aiguilles avait diminué de 18 % à 2 %. |
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RdR, VHC et des dommages liés à l’injection | ||
Si l’efficacité de la RdR est avérée dans le champ du VIH, il n’en est pas de même pour le VHC, alors que ce virus représente une "bombe à retardement", selon les termes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Et pour cause : la conscience du problème est très faible, aucun vaccin n’a été développé à ce jour et les traitements actuellement disponibles sont beaucoup trop coûteux pour être largement distribués à tous ceux qui en ont besoin. C’est dire l’importance de la prévention. Dans son dernier rapport, la Commission mondiale pour la politique des drogues, insiste sur la question de la réduction des risques dans le domaine du VHC. La virulence du VHC exige de l’usager de drogue qu’il se conforme à de plus grandes exigences d’asepsie. Une méta-analyse, à partir de 6 enquêtes menées en Angleterre, incluant 2986 individus, distinguent les taux de contamination en fonction de populations qui suivent rigoureusement ou pas les conseils de RdR. L’étude constate que "lorsque la réduction des risques est complète, la réduction de l’incidence est accrue avec un OR associé au risque de 0,21 (IC95 : 0,08-0,52), lorsqu’elle est partielle, la réduction du risque est moindre et pas complètement significative (0,5 ; IC95 : 0,22-1,12)." La prévalence du VHC chez les consommateurs de crack non injecteurs atteint 45% selon l’étude Coquelicot. La pratique du partage de la pipe à crack y était rapportée par 8 usagers sur 10. Une enquête épidémiologique de type avant/après a été mise en place à deux reprises en 2010 et 2012 auprès de 350 usagers de crack recrutés sur Paris et Saint-Denis. Ces deux enquêtes épidémiologiques ont été séparées par une intervention de santé publique, qui consistait à distribuer massivement un nouvel outil de RdR spécifique pour le crack par voie fumée, outil sélectionné sur sa capacité à réduire les risques. |
Le critère de jugement principal de l’enquête était la réduction des lésions liées au crack au niveau de la bouche et des mains des usagers. Ces lésions étaient évaluées par un enquêteur dans le cadre d’une évaluation clinique. Lors de la phase de pré-intervention, en 2010, les pratiques de partage de pipe à crack étaient particulièrement élevées, concernant près des trois quarts des usagers au cours des six derniers mois. Et la prévalence des lésions observées par les enquêteurs atteignait plus de 80% des usagers de crack. En 2012, 18 mois après la phase de distribution du nouvel outil de RdR, la prévalence des lésions a été divisée par trois, et concerne désormais environ un tiers des usagers de crack. Cette recherche vient valider l’existence de lésions mains-bouche liées à l’utilisation de pipes à crack en verre et à la manipulation de fils électriques et la capacité de ce nouvel outil de RdR à les diminuer. |
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RdR et régulation des troubles à l’ordre public | ||
La régulation des troubles à l’ordre public est l’un des arguments avancés en faveur des salles d’injection. La RdR est néanmoins interpellée sur le travail éducatif mené pour inciter les usagers de drogues à ne pas abandonner leur matériel d’injection dans la rue et d’éviter les comportements d’injection dans les lieux sensibles, notamment à proximité d’enfants. Un homme s’est injecté en présence d'élèves, de parents et d'enseignants de l'école Anatole-France à Sevran à l'heure de la sortie, créant une vive émotion. La semaine précédente, dans une autre école de la ville, trois enfants s'étaient piqués en jouant avec une seringue usagée tombée dans la cour. Les neuf enfants qui l'ont manipulée, ont été pris en charge à l'hôpital. Trois d'entre eux, dont des petites filles de 6 ans piquées, l'une à l'index, l'autre à la paume, ont reçu un traitement préventif par bithérapie pour prévenir d'éventuelles maladies infectieuses. |
Un enfant de 12 ans a reconnu avoir piqué, par "jeu", plusieurs de ses camarades dans un collège de Longlaville en Meurthe-et-Moselle avec une seringue qu'il a dit avoir trouvée dans un bus scolaire. Le maire de Sevran, Stéphane Gatignon, a demandé la suspension de la distribution de seringues sur sa ville.Sources : Sources : 24.04.13. AFP sur Romandie.com. A Sevran, le maire veut suspendre la distribution de seringues |
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Interventions en milieu festif | ||
La Fédération addiction publie un « 8 pages » Intervenir en milieu festif : cadres et pratiques et l’AFR cahier des charges des interventions liées aux usages de produits psycho-actifs en milieux et lieux festifs. Une première forme d’intervention en milieu festif consiste en une présence sanitaire traditionnelle de secouristes et pompiers lors des rassemblements autorisés. L’intervention d’acteur de la RdR en milieu festif est née au milieu des années 90 dans le contexte des raves, free parties et les tecknivals et en réponse au manque d’information concernant les psychostimulants (ecstasy) et les hallucinogènes (LSD). Ses premiers acteurs sont des associations d’auto-support et de santé communautaire (Technoplus, le Tipi, Spiritek, Keep Smiling, le Bus 31/32, Asud Loiret). En 1998, la création de la « Mission Rave » par Médecins du Monde va contribuer à médiatiser cette RDR festive. En 2004 avec la Loi de Santé Publique, les interventions en milieu festif sont reconnues comme un outil de la RdR, mais reléguées au plan des missions non obligatoires des CAARUD, ces interventions peinent à trouver une véritable reconnaissance. L’intervention de l’acteur de la RdR est principalement fondée sur la réassurance : une présence humaine et chaleureuse suffit bien souvent à faire « redescendre » doucement les personnes qui ont perdu pied, avant que cela ne tourne mal. La réassurance n’est pas quantifiable et n’est jamais une séance de psychothérapie, ni d’analyse. Aucune interprétation n’est renvoyée à la personne. Les questions de l’intervenant se limitent aux faits. Pour d’autres cas, exceptionnels, une intervention médicalisée peut s’avérer indispensable. Une grande partie de ce travail consiste à écouter, informer, rassurer et accompagner les personnes en détresse, évitant ainsi des complications psychiatriques (décompensation psychologique) et une évacuation parfois vécue comme un traumatisme. Dans le cas d’une évacuation un travail de relais avec les secours et d’accompagnement permet de minimiser les conséquences qui peuvent en découler. L’expérience permet d’identifier plusieurs dispositifs d’intervention : |
- Une infirmerie pour les petits soins permettant d’effectuer un premier tri et d’éviter d’engorger les postes de premiers secours ; Le matériel de réduction des risques doit être adapté : Sources : |
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Drogue, performance et comportements à risques sexuels | ||
La recherche de performance sexuelle ne s’accomode pas toujours avec les drogues, la cocaïne, les amphétamines, le MDMA, l’alcool ou le cannabis ayant des effets variables d’un individu à l’autre, d’un moment à l’autre, stimulants ou au contraire inhibant. D’où, dans une société où l’usage du Viagra® devient massif, une tendance des usagers de drogues à utiliser des stimulants érectiles comme le Viagra®, le Cialis®, le Maximenpills®, le Powertabs et le Golden Rottes (les deux dernières étant des substances illicites) pour contrer l’effet débandant parfois provoqué par certains produits. Aides a fait paraître une étude qualitative sur la pratique du "slam", c’est-à-dire un usage de cathinones, en injection, dans le cadre de relations sexuelles, principalement dans le milieu festif gay [voir aussi "Usage de drogues et comportements sexuels à risques" in "Réduction des risques - Actualité 2012 - 2nd Semestre"]. Les 14 personnes interrogées sont des hommes, homosexuels, ayant des comportements à risques (notamment, relation sans préservatifs, partenaires multiples), fréquemment séropositifs (9 sur les 14). Ils utilisent principalement des cathinones qui provoque une grande empathie et une perception accrue des sens. L’accès aux cathinones est aisé puisqu’elles sont commandées sur Internet et livrées à domicile. Le coût du gramme de cathinone n’excède pas 20 euros et il est dégressif en fonction de la quantité commandée. Les slameurs font état de difficultés à maîtriser, dans la durée, les injections de cathinones, de difficulté à contrôler la fréquence et la quantité consommée, surtout lorsqu’ils sont dans un milieu ou avec un partenaire qui consomment des cathinones. La fatigue induite par l’usage de ce psychostimulant, peut induire une consommation à fin de pouvoir tenir le coup dans d’autres contextes. |
La "descente" brutale qu’induit le produit génère un fort "craving". "La volonté de poursuivre les injections jusqu’à épuisement du produit entraîne une diminution de l’attention accordée au partage du matériel d’injection. Ainsi certains slameurs ont signalé des fins de soirées durant lesquelles le manque de matériel peut inciter les participants à réutiliser des seringues usagées ou à partager le matériel." Les slameurs qui ne se perçoivent pas comme des usagers de drogues, mais plutôt comme des individus qui "dopent" leur sexualité, n’ont que faiblement conscience du pouvoir addictogène des cathinones et des connaissances médiocres en termes de réduction des risques (VHC, dommages liés à l’injection). "L’achat de Stéribox en pharmacie, notent les auteurs, est vécu comme un moment "traumatisant" pour les slameurs à cause de l’image de "toxicomane" auquel les renvoie cet achat." Pour D. Lestrade (Act Up), le problème vient aussi de ce que ces usagers qui ont bien souvent consommé le LSD, l’ecstasy, le GHB, le cristal "croient tout savoir sur les drogues, le sexe et leurs interactions" : "Ils se considèrent intouchables, et les caractéristiques de ces drogues amplifient ce sentiment d’impunité et d’insouciance. Les usagers de slam savent qu’ils sont dans une position d’innovateurs et leur pratique fait tache d’huile, comme dans tout milieu d’initiés." D. Lestrade souligne le contexte de vulnérabilité lié à la séropositivité : "nous sommes les plus vulnérables à ces addictions qui nous scotchent au plaisir, nous envoient dans le décor d’amours fulgurantes et intenses dont nous avons besoin pour avoir, "une heure, rien qu’une heure seulement", nous sentir vivant." Sources :06.03.13. blog.Rue 89. Drogue et cul : au choix, cocktail magique ou tue-le-sexe (Laurent Appel, Journaliste, ASUD) |