SYNERGIE - Réseau Ville Hôpital

 

QUELS SONT LES ENJEUX CONTEMPORAINS DE LA TOXICOMANIE ?
Conférence du Dr. Gilles NESTER, CSAPA Rivage, CH de Gonesse

Pôle de Psychiatrie Générale du CH de Gonesse, Séminaire 2008/2009

Les acteurs de l’addictologie dans l’Est du Val d’Oise

C’est à moi que revient aujourd’hui l’honneur d’animer le Séminaire de notre Pôle de Psychiatrie au Centre Hospitalier de Gonesse et je remercie le docteur Olivier Labergère de cette invitation.

En partant de l’expérience du Centre Rivage qui accueille les toxicomanes de nos secteurs, je voudrais vous présenter quelques réflexions autour de la clinique, et des avancées et enjeux récents dans le traitement des addictions.

Cette intervention n’est pas sans lien avec les séminaires précédents sur le rôle de la psychanalyse dans nos pratiques auprès de patients dont les prises en charge sont de long terme, à l’instar de ce que nous connaissons en Psychiatrie. Faisant écho également à ce qui a été dit récemment en ces lieux sur la pensée postmoderne, ces phénomènes d’addiction illustrent avec une grande acuité ces notions de la fin du grand récit de l’humanité, le fait que l’individu tend de plus en plus à s’autoréférencer et à chercher une identité qui lui échappe, qui est de plus en plus précaire et fragile. Cet individu sujet en quête de sens, de valeurs, à donner à son existence interroge toujours plus loin des signifiants jusqu'à se confronter à la mort, signifiant ultime, dans un rapport de consommation à l’objet, typique de notre époque.

Depuis quelques années les pouvoirs publics ont pris conscience des problèmes posés par ces addictions, notamment en termes de santé publique.

On constate l’augmentation concomitante des consommations et de l’implication envers les soins, aussi bien l’offre que la demande de soins sont en constante augmentation.

Les tendances actuelles se traduisent dans les activités du Centre Rivage. Nous sommes régulièrement sollicités pour de nouvelles actions comme celles concernant les jeunes en difficulté et l’usage de cannabis, la consommation de crack et de cocaïne, et des psychostimulants en général, les phénomènes de polyaddictions, les mésusages et détournements de médicaments de substitution ou de psychotropes.

Au niveau de notre Centre Hospitalier, la question des toxicomanies n’est pas encore clairement à l’ordre du jour alors que les CH généraux sont actuellement sollicités pour monter des équipes en addictologie. Les consultations de tabacologie et d’alcoologie à Gonesse pourraient constituer les bases d’un travail plus large dans cette direction.

Il y a également du côté des pouvoirs publics une volonté de promouvoir la recherche et l’on s’interrogera sur ce que nous a apporté la recherche scientifique sur les addictions et en quoi celles-ci contribuent à ces travaux.

Du côté des laboratoires pharmaceutiques, l’engagement n’est pas encore très fort, bien qu’il y ait un énorme potentiel du fait des niveaux de consommation et de l’attente des usagers en termes de soin. Ce potentiel est encore faiblement exploité à l’heure actuelle.

Observations sur les trafics et les limites de la répression

Avant de revenir sur ces questions d’ordre clinique et scientifique, je voudrais dire un mot sur l’économie générée par le trafic des drogues. Les enjeux économiques et politiques dans ce secteur d’activité sont énormes, au point qu’on se demande si les pays concernés peuvent vraiment renoncer aux capitaux qui sont en jeu.

Par exemple, pour les 3 mafias italiennes qui gèrent une grande partie du trafic international, cela représente 100 000 000 € de chiffre d’affaire annuel. Ce serait à cet égard l’économie la plus importante de l’Italie, et il en est de même au niveau européen où le chiffre d’affaire de la drogue doit avoisiner les 500 000 000 €. Est-ce que l’Italie peut renoncer à cet argent qui circule sur son territoire ?

Est-ce que l’Espagne, la principale porte d’entrée de la cocaïne en Europe peut renoncer à ce passage de capitaux ? Même chose en France.

La question est très complexe. On note aussi que quand de nouvelles mesures sont prises (les dernières pour autoriser des perquisitions afin de saisir les biens des trafiquants et leur portefeuille), ou quand de nouvelles lois sont votées, les narcotrafiquants arrivent à anticiper, à trouver des parades juridiques et à s’organiser pour contourner toutes ces mesures. On constate que le poids économique de cette activité est très lourd, et qu’on peut observer le phénomène au niveau de notre hôpital comme dans les cités environnantes, les banlieues, et jusque dans les campagnes les plus isolées.

Epidémiologie, produits licites et illicites

Dans notre activité à Rivage, on s’occupe de toxicomanie donc de l’usage de substances dites illicites mais les toxicomanies s’inscrivent dans un champ plus large qui est celui des addictions dans lequel les définitions ont peu évolué, restant toujours dans le registre descriptif des troubles du comportement, ou bien élaborées en partant des caractéristiques des produits et substances consommés.

Partons de quelques chiffres pour voir l’étendue actuelle du phénomène :

- En France, 8 millions de personnes sont dépendantes du tabac et 5 millions sont abuseurs d’alcool. Les consommations de tabac et d’alcool causent 100 000 décès par an.
- 23 millions de personnes sont dépendantes de l’alcool en Europe, cela représente 5% des hommes et 1% des femmes.

On voit l’ampleur du phénomène avec l’alcool et le tabac, drogues licites, les chiffres concernant les produits illicites sont bien moindres mais ont une très forte visibilité de par les nuisances individuelles et collectives qu’ils entrainent. Ils indiquent que ces phénomènes de consommation sont en train de s’amplifier, d’augmenter régulièrement.

- 500 000 usagers quotidiens de cannabis en France

- 5 000 000  à l’échelle européenne

- Concernant les opiacés : 150 000 dépendants des opiacés en France (consommation qui reste stable)

- Un nombre équivalent pour les usagers de stimulants, comme la cocaïne, dont la consommation est partout en augmentation.

On notera également le retentissement médical, lourd en termes de morbidité, pour ne citer qu’un indicateur : 1 000 000 d’ex-injecteurs de drogue sont porteurs de l’hépatite C en Europe et vont nécessiter de lourds moyens de mise en route de traitements.

En termes de comportement chez les usagers, les tendances décrites actuellement poursuivent ce qu’on observe déjà depuis plusieurs années: la consommation de cannabis, la consommation de cocaïne et de psychostimulants qui ne cessent d’augmenter en s’élargissant vers tous les milieux sociaux, les phénomènes de polyconsommations qui ont toujours fait partie des conduites addictives, mais suivent les évolutions des époques et des modes avec des consommations de cocktails de psychotropes toujours plus inattendus et plus dangereux. S’ajoutent également les phénomènes de production à domicile de cannabis et le développement des laboratoires clandestins qui rendent un peu plus complexe la lisibilité de l’étendue des consommations. Les apparitions de nouveaux psychotropes et de nouvelles façons de consommer sont en constante évolution et rendent toujours plus ardues les tâches des soignants comme celles des services de répression.

Approches neurobiologiques

Cette visibilité toujours plus grande des comportements addictifs et de leurs conséquences dans nos sociétés est aussi un stimulant incomparable pour la recherche dans le domaine de la neurobiologie. A bien des égards, le phénomène des toxicomanies a poussé notre questionnement sur le fonctionnement du Système Nerveux, sur l’effet des drogues, sur la façon dont la dépendance se crée, ce qui a toujours intéressé les chercheurs et favorisé de nombreuses découvertes. Ces recherches qui partent souvent de l’expérimentation animale vont vers une meilleure connaissance du SN et des mécanismes de conditionnement qui opèrent dans les addictions. Bien que ce soit un peu limitatif comme façon de voir les choses et non exempt de critiques, c’est un point de vue qui a le mérite d’être exposé.

Au départ c’est sur la dopamine -neurotransmetteur de l’activité psychomotrice- que s’est focalisée la recherche neurobiologique. Dès les années 1980, les études montrent qu’il y a une libération de dopamine au niveau du système méso limbique, circuit du conditionnement par le renforcement positif ou négatif de nos comportements en fonction de la réponse agréable ou désagréable qu’on en obtient. C’était là un premier modèle où la dopamine était au centre de ce qui pouvait expliquer les effets des drogues.

Depuis, les études plus récentes montrent que ces circuits sont extrêmement complexes et qu’après la dopamine nombre d’autres neuromédiateurs sont impliquées, notamment la sérotonine et la noradrénaline, dans la régulation de nos comportements.

Ainsi il ne suffit pas de cet effet sur la dopamine pour créer la toxicomanie, on débouche là sur des notions débattues actuellement comme la notion de vulnérabilité et le fait que nous ne sommes pas égaux dans nos réactions face à ces drogues.

La noradrénaline va être impliquée dans le contrôle, dans ce qui nous pousse à faire de nouvelles expériences. La sérotonine est plus impliquée dans la sensibilisation à long terme, dans des comportements à répétition et dans la protection vis-à-vis du stress et des agressions extérieures.

On met en évidence dans les recherches que ces deux systèmes sont couplés, inter régulés et que l’effet des toxicomanies est d’entrainer une sorte de découplage de ce système qui peut rendre compte de certains éléments de la clinique (les pertes de contrôle, l’hypersensibilité à un produit) et qui peut expliquer l’artifice que produit la drogue. Celle-ci reproduit artificiellement et temporairement le recouplage du système.

Le toxicomane en manque est extrêmement mal, il est angoissé, agité et la prise de drogue va subitement lui redonner une sensation normale de pouvoir exister, de sentir les choses, d’être en relation avec les autres, sans cette souffrance intense. Finalement, c’est ça qui peut chez les sujets fragiles et vulnérables expliquer la construction d’une dépendance et d’une toxicomanie. C’est ce qui explique l’appétence extrêmement forte chez les personnes qui sont entrées dans une dépendance, ce qu’on appelle le craving.

Deux « modèles » : « Drug is queen » & « I am the king »

D’autres études montrent aussi que les individus qui répondent fortement au stress avec beaucoup d’anxiété constituent une sorte de groupe à risque face aux toxicomanies.

On peut dégager deux tendances explicatives, deux modèles, de la production de la toxicomanie :

1. « Drug is queen » : c’est la permanence du produit, sa présence dans notre environnement qui sensibilise et qui peut aboutir à la toxicomanie (exemple de l’alcoolisme d’entrainement social) ;

2. « I am the king » : Prédisposition de la personnalité, la rencontre avec la drogue peut être une sorte de révélation chez des sujets dont la personnalité les y prédispose.

Certains héroïnomanes racontent combien la rencontre avec l’héroïne est vécue comme une sorte de coup de foudre qui procure des sensations de bien être, de plaisir, de meilleure gestion des relations avec les autres.

On voit comment, par la fragilité même du sujet qui s’exprime, par son histoire, certains deviennent tout de suite ou très vite « accros ».

Les modèles neurobiologiques nous rapprochent finalement du sens premier, étymologique, du mot addiction qui signifie « payer sa dette », payer sa dette pour retrouver son homéostasie. L’équilibre interne dépend ainsi d’un produit exogène. Le toxicomane va dire que pour se sentir normal, il a absolument besoin de cette substance qui lui est devenue indispensable.

La place du sujet

On met souvent en avant le schéma classique :

Consommation normale >>> abus >>> dépendance

alors même qu’il connait des variations importantes selon les substances et selon les individus.

On insiste ainsi trop souvent sur les facteurs biologiques de vulnérabilité en oubliant l’histoire du sujet et sa capacité à construire sa personnalité et son identité là où d’autres, du fait de leur profond état d’insécurité intérieure, du défaut de l’estime de soi, des ruptures familiales n’ayant pas permis un étayage précoce correct -autant de facteurs exogènes de vulnérabilité- sont davantage disposés aux conduites à risque et aux conduites addictives.

Dès les premières expériences avec le produit, il n’y a pas de retour possible à l’innocence antérieure, c’est ça aussi que nous apprennent les biologistes : le cerveau est toujours prêt à recommencer, toujours prêt pour la rechute. C’est ce que l’on constate dans la clinique assurément, et chez certains on pourrait dire que le cerveau était déjà prêt, dès les premières prises.

Beaucoup d’usagers d’héroïnes racontent comment, à distance du sevrage, parfois des années après, dans un certain contexte ils vont ressentir à nouveaux les signes du manque bien qu’ils ne soient plus physiquement dépendants depuis longtemps.

Qu’en est-il des avancées thérapeutiques ?

Pour ce qui est de l’héroïne et des opiacés, on dispose depuis 1995 des traitements de substitution aux opiacés, la Buprénorphine (Subutex) et la Méthadone. On a souvent entendu décrier ces produits, soit concernant leurs effets, en les disqualifiant en tant que drogue eux-mêmes, soit concernant la démarche qui consiste à donner des substances qui rendent dépendants, plus exactement qui entretiennent la dépendance de gens qui le sont déjà. C’est peut-être propre à notre mentalité en France, on insiste beaucoup sur les conséquences négatives, sur les effets délétères qu’on a pu constater dans quelques cas, comme par exemple les mésusages, le détournement des produits qui peuvent être sniffés, injectés, mélangés, les trafics de ces traitements… tout cela concerne en fait une population minime à savoir moins de 5% des usagers.

Cette activité étant assez bruyante et démonstrative, ils font en effet parler d’eux.

Mais il y a en France encore trop peu d’études qui évoquent les résultats positifs de ces traitements, comme la possibilité de se stabiliser et de reprendre son destin en mains, mais aussi la réduction de la délinquance, la chute radicale des décès par overdose, la diminution de la contamination virale et la facilitation de l’accès aux soins, et surtout un meilleur contrôle pour ces patients de leur consommation de drogue. Ces résultats ne sont peut-être pas spectaculaires, ils ne règlent pas sur le fond la question des addictions, mais ils apportent une aide concrète pour réduire les conséquences de la dépendance.

La question de l’arrêt et de la substitution « à vie »

Après l’introduction des traitements de substitution aux opiacés, une question apparait maintenant avec les dix ans d’expérience en France et avec les 30/40 ans d’expérience dans d’autres pays, c’est la question de l’arrêt de ces traitements. C’est une question complexe, car l’objectif premier des patients qui sont traités ainsi, est d’arrêter cette dépendance aux substituts, pouvoir dire un jour « j’arrête de prendre ces produits », mais les conditions d’un sevrage ne sont pas facilement réunies et l’objectif du médecin ne concorde pas toujours avec celui du patient. Des études montrent par exemple que le risque d’overdose est 10 x plus important hors traitement de substitution que chez les usagers traités. Le risque d’overdose est augmenté après un sevrage.

Faut-il préconiser ces traitements à long terme ?

On peut penser qu’il y a des usagers qui depuis trop longtemps consomment des produits ou qui ont une vulnérabilité telle qu’on les remet sans cesse en danger en voulant à tout prix mener un sevrage. Dans le cadre d’un accompagnement thérapeutique, on peut suivre l’évolution du patient, c’est à lui de gérer sa dépendance et l’arrêt du traitement. C’est une attitude qui permet de laisser les usagers décider à quel moment ils peuvent diminuer le traitement et à quel moment ils peuvent envisager un sevrage dans la mesure où les conditions de stabilité et d’autonomie sont réunies. Le rôle du médecin serait plutôt de dissuader ceux qui voudraient aller trop vite vers un sevrage mal préparé, ou qui sont trop fragiles de par leurs comorbidités ou leur situation.

Quelles alternatives ? Abstinence, thérapies comportementales…

Parallèlement à cela, les autres méthodes de soin qui vont vers l’abstinence n’ont pas apporté de résultats décisifs. Cela reste souvent des projets d’ordre idéologique, de vouloir l’abstinence, comme ce que l’on peut observer dans les pratiques des communautés thérapeutiques où l’efficacité des techniques va dépendre avant tout de la durée du séjour : les personnes y restent le plus longtemps possible, avec un cadre très strict où elles sont surveillées, où pas une minute de leur emploi du temps n’échappe à la communauté. Tout cela peut prêter à réflexion et à certaines critiques.

Les techniques comportementales sont intéressantes dans le sens où elles visent justement à un changement de comportement et peuvent compléter les traitements pharmacologique et psychothérapeutique. Elles peuvent être utiles dans certaines formes d’addictions, ou lorsqu’aucun traitement médicamenteux spécifique n’est à notre disposition. Il en est ainsi pour les usages de cocaïne et autres psychostimulants.

Essais cliniques avec la Ritaline®

Il y a beaucoup de recherches actuellement du côté des psychostimulants et de la cocaïne.

Il est tentant de reprendre le modèle de la substitution aux opiacés : puisque l’on donne des morphiniques aux personnes dépendantes, est-ce que l’on ne pourrait pas donner des stimulants aux addicts à la cocaïne ?

On a ainsi l’expérience du trouble de déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) qui est traité, outre Atlantique et maintenant en France, par la Ritaline qui est une amphétamine. Chez ces sujets hyperactifs, l’amphétamine a le pouvoir de les aider à mieux se concentrer et à mieux contrôler leurs comportements.

Dans ce sens, on a constaté dans notre pharmacopée classique, environ 50 substances psychostimulantes, ce qui peut faire l’objet d’études pendant pas mal de temps, comme on peut l’imaginer.

Des tests ont été faits chez deux groupes de patients :

- Des héroïnomanes sous méthadone et consommateurs d’autres psychotropes dont la cocaïne et autres stimulants

- Des patients ayant un diagnostic pendant l’enfance ou l’adolescence de TDAH, traités ou non par des amphétamines et devenus ultérieurement dépendants de la cocaïne.

Les résultats de ces études montrent que chez les patients souffrant de TDAH, l’administration de psychostimulants ou d’amphétamine n’est pas du tout probante, et ne les protège pas d’une addiction à la cocaïne. En revanche, c’est plus pertinent chez les héroïnomanes sous traitement de substitution, où dans un cadre de prise en charge assez strict et très élaboré, certaines substances stimulantes peuvent aider à diminuer la consommation de crack ou de cocaïne.

Antipsychotiques et « vaccins » anti drogue

Un autre axe de recherche concerne les antipsychotiques de nouvelle génération. Ces études qui se voulaient ambitieuses et qui devaient théoriquement montrer l’efficacité des antipsychotiques par leur action sur la dopamine, ne sont en fait guère probantes. Les résultats ne sont en tout cas pas suffisants pour créer une indication thérapeutique pour les addictions à la cocaïne.

Une autre recherche, toujours dans ce type de démarche, concerne les vaccins anti drogue. On a expérimenté des techniques vaccinales pour la cocaïne. Ces techniques ne produisent pas à proprement parler un vaccin contre la cocaïne : on ne produit pas d’anticorps anti cocaïne, molécule trop petite et non immunogène ! Mais pour sensibiliser un sujet, on provoque une réaction immune avec une toxine inactivée (sur laquelle sont fixées les molécules de cocaïne) qui induit une production d’anticorps qui vont ainsi fixer la cocaïne. Cette production d’anticorps annule plus ou moins partiellement les effets de la cocaïne et en rend moins intéressante la consommation.

La production d’anticorps est limitée dans le temps, c'est-à-dire qu’elle est liée à l’injection de la protéine qui va sensibiliser temporairement le sujet.

Ce genre de technique a été expérimenté et fonctionne dans les conditions d’un protocole de plusieurs injections avec piqures de rappel tous les trois mois, car au-delà l’effet s’estompe. L’usage de ces traitements pose des questions évidemment éthiques et d’ordre déontologique.

Les cliniciens en ont dégagé quelques indications limitées et qui nécessitent la participation des patients. Cela peut être utile dans le traitement des overdoses à la cocaïne, dans des situations de rechute lorsque les patients sont demandeurs. Cela pourrait faire également l’objet d’un traitement imposé dans un cadre judiciaire, ou dans le cadre d’une grossesse chez des futures mères addictes au crack ou à la cocaïne. On est face à des données nouvelles, dont on ne sait pas sur quoi elles vont déboucher, si elles vont donner lieu à des indications thérapeutiques dans les années futures. Le cadre de ces prescriptions demande réflexion.

Un autre écueil de ces techniques chez des sujets polyaddicts, c’est le risque de passer à d’autres drogues ou bien le risque de surconsommer puisque le cocaïnomane qui veut malgré le vaccin obtenir un effet va consommer deux ou trois fois plus pour déborder l’action du traitement.

Cannabis

Je voulais dire aussi un mot à propos du cannabis. J’avais fait antérieurement une intervention intitulée « Cannabis et Schizophrénie » pour constater que l’on connait mieux maintenant l’impact du cannabis sur nos patients schizophrènes, notamment le fait de provoquer ou d’accompagner les rechutes. La consommation de ce produit est tellement répandue et banalisée qu’il est très fréquent que nos patients soient consommateurs de cannabis et il y a tout un travail à effectuer pour les aider à se départir de ce type de consommation, ne serait-ce que dans l’intérêt du traitement de leur maladie psychiatrique. Je vous renvoie sur ces sujets aux articles que nous avons mis en ligne sur le site de notre réseau ville hôpital, rvh-synergie.org.

La recherche clinique en matière de cannabis reste confrontée à d’importantes difficultés pour concevoir un modèle qui permette de valider les protocoles thérapeutiques à l’étude. On peut citer un programme assez ambitieux s’appuyant sur le modèle des thérapies familiales, l’INCANT study, associant plusieurs pays européens pour tenter de valider un protocole de psychothérapie dans une étude randomisée.

Dans le cadre de cette étude un grand nombre de jeunes ont été sélectionnés, et leurs familles convoquées pour participer à l’étude. Les avatars de ce programme montrent qu’il faut savoir distinguer les usagers-cible de la masse des consommateurs, les usagers-cible étant ceux qui sont les plus fragiles ou ceux dont la consommation est des plus symptomatiques, les usagers les plus en souffrance et qui ont besoin de soin.

A cet égard, ce phénomène du cannabis nous pointe les limites de ces approches trop scientifiques et pragmatiques. Il faudrait repartir de ce que symbolise pour notre jeunesse la jolie feuille étoilée du cannabis : un accessoire de mode, un signe d’identification qui est immédiatement perçu par les pairs. C’est le signe que les drogues font vraiment partie de notre environnement quotidien, deux garçons sur trois à 18 ans ont fait une expérience avec le cannabis, une fille sur deux. Il est assez logique qu’au moins une fois l’expérience soit faite. Ainsi cette bataille, cette guerre à la drogue qui voudrait éradiquer ces produits de notre environnement est quasiment perdue d’avance.

Trouble du narcissisme et société addictogène

Ce phénomène de toxicomanie, comme d’autres problèmes que l’on pointe chez les jeunes, est bien souvent un miroir grossissant de notre monde, de notre société, cela prend quelque fois la forme d’une caricature mais cela dit bien dans quel monde on vit. On peut faire le constat que l’évolution de notre société de consommation favorise l’émergence des conduites addictives. C’est devenu un moyen de gestion de la relation à l’autre et à soi-même. L’addiction, quelque soit l’objet en cause, serait ce comportement qui nous mettrait à l’abri de la dépendance envers l’autre.

Lors des consultations en psychiatrie ou en addictologie, on voit de plus en plus fréquemment des troubles du narcissisme chez les patients que nous rencontrons, des troubles qui s’expriment dans une relation à l’objet d’une ambivalence extrême. Cela renvoie à des phénomènes propres à l’adolescence, l’adolescent étant pris entre sa peur de l’objet qui l’abandonnerait et sa peur de sa propre violence qui pourrait détruire l’objet. Ce qui est bien illustré dans la relation à la mère : la mère qui est à la fois source d’angoisse par les désirs qu’elle peut inspirer, dont l’enfant ou l’adolescent est dépendant et dont l’absence provoque des angoisses insupportables.

Cette relation de dépendance appartient à notre histoire à chacun de nous. L’enfant est dépendant de ses parents : c’est le début de l’histoire et c’est à travers cela que l’on acquiert les sentiments de confiance et de sécurité nécessaires pour se développer, si ces premières relations sont suffisamment sécurisantes.

Le phénomène d’addiction intéresse tout le processus de séparation – individuation largement décrit qui aboutit dans l’adolescence à un individu qui peut s’épanouir dans la conscience de soi tout en découvrant et en acceptant ses propres limites.

Quand cela se passe mal, quand la blessure narcissique est à vif, la honte de soi peut déboucher sur des conduites à risques ou des comportements d’emprise qui peuvent donner l’illusion de maitrise, éléments que l’on retrouve souvent dans le discours des toxicomanes. Face à ces situations, ici en Psychiatrie comme dans les consultations en Addictologie, c’est dans les moments où la carapace craque, quand la vulnérabilité débouche sur la dépression que l’individu peut bénéficier d’un étayage et avancer dans sa recherche d’autonomisation.

Des patients qui mettent en doute notre savoir

Je voulais faire un parallèle avec la figure de l’hystérique - qui a éclairé notre clinique psychiatrique à la fin du 19ème siècle -. On pourrait se demander si, à bien des égards, le toxicomane ne serait pas le nouveau modèle qui stimule la recherche clinique aujourd’hui, un nouveau modèle pour la psychiatrie en ce début de 21ème siècle. Un modèle décrié, méprisé comme a pu l’être l’hystérique en son temps. On peut constater que le champ des addictions connait une certaine vogue actuellement mais se trouve malheureusement réduit bien souvent à de simples conjectures comportementalistes ou alors à sa contribution aux neurosciences. Le personnage du toxicomane lui-même souffre toujours autant de nos préjugés et bien souvent d’un syndrome d’exclusion.

On ne voit pas suffisamment à quel point il peut aussi nous apprendre quelque chose sur les zones sombres et sur les limites de notre nosographie. C’est souvent ce type de patient qui met en échec nos codes bien écrits, bien appris à l’avance, les notions cliniques qui restent floues comme celle de borderline, d’états-limite, de psychose blanche. Nous avons l’habitude de travailler avec des tas de concepts et d’étiquettes qui montrent aussi les limites de notre savoir. Le toxicomane vient appuyer sur ces questions là.

Il nous montre que la drogue n’est pas tant le problème mais la solution pour lui.

C’est, dans son système à lui, ce qu’il a trouvé de mieux pour continuer à vivre, ce qui illustre la dimension auto-thérapeutique des comportements addictifs, encore faut-il se poser la question : auto-thérapeutique de quoi ?

En plus de faire référence à l’anxiété, à la dépression et à certains traits de la psychose, on en revient souvent à l’étiquette qui permet d’exclure et de maitriser qui est le diagnostic de psychopathie décrite comme une perversion qui fait endosser une identité beaucoup trop forte et aveuglante nous empêchant d’accéder à la dimension de la souffrance.

Ainsi, on peut constater que le toxicomane ne reçoit pas toujours les soins ou l’attention qu’il mériterait parce que ce n’est pas un patient docile mais un patient qui met en doute notre savoir.

C’est d’ailleurs un patient qui lui-même développe un savoir : les toxicomanes ne sont-ils pas des petits pharmacologues en puissance ?

Des patients qui ouvrent sur d’autres questions

A ne considérer que le trouble comportemental on oublie ces questions d’ordre psychopathologique, et peut être que nous psychiatres ou nous soignants en psychiatrie tout particulièrement devrions être les premiers à rechercher ce qu’il y a derrière cette présentation, derrière ces comportements toxicomaniaques et à essayer de comprendre quel est le sujet qui se trouve face à nous.

Parfois la simple prescription d’un antipsychotique suffit à changer notre vision et à permettre le contact avec des patients jugés difficiles et indociles, et au-delà de ce trouble que l’on qualifiera d’atypique, que peut commencer à se construire une prise en charge.

Ces patients nous amènent aussi à développer une réflexion sur la violence : la recherche d’un remède à ce type de trouble nous ramène vers la créativité, ce qui est sans doute une des meilleures solutions pour permettre à l’homme de s’émanciper de ses dépendances. La créativité du pauvre, de celui qui se sent impuissant c’est bien souvent malheureusement la destructivité.

On a assisté aux phénomènes de violence dans les banlieues : casser son école, casser son arrêt de bus, brûler des voitures, bref s’attaquer à son environnement c’est une façon de s’attaquer soi-même. La façon ultime de s’attaquer soi-même c’est aussi de mettre en échec sa vie sociale, ses projets, c’est recourir aux addictions, une forme plus ou moins déguisée de suicide et d’autodestruction. Si tout est vécu autour de soi comme menaçant, comme impossible, se détruire reste encore possible. C’est un des drames du toxicomane.

Je voudrais enfin vous citer une phrase tirée d’un aphorisme oriental et disant ceci : « Regarde le zéro, tu ne verras rien, mais regarde à travers le zéro et tu verras l’infini ».

On peut faire le parallèle avec les drogues : « Regarde la cocaïne, tu ne  verras que de la poudre mais regarde à travers la cocaïne, tu verras le monde ».

 

SORTIE DE TOXICOMANIE : "LA CONSTANCE DU JARDINIER"
Interview du Dr Jacques BARSONY,
Toulouse (31) par PRA31

Le Flyer N°47, mai 2012

Note de la rédaction

Ce texte est une interview du Dr Barsony par le réseau PRA31. 

Ce mode « interview » permet à ce praticien expérimenté de répondre aux questions fréquemment posées sur ce sujet d’actualité et non sans un certain sens de l’humour.

Il y en a beaucoup qui s’en sortent ?

Il y en a 22 !

Sur une cohorte de 326 patients en traitement de substitution aux opiacés, suivis pendant 54 mois, 94 ont arrêté. 

Seuls 22, dont le sevrage a été fait de façon progressive, dans le cadre d'un suivi ancien et régulier, ont été recensés (Thèse de médecine de Marie Porcher 17 déc. 2011, d'après une étude des données de la CPAM de la Haute-Garonne).

Ils sont guéris ?

La rechute étant toujours possible et la durée moyenne de l’après-cure étant de 50 ans (le temps

moyen qu'il reste à vivre), le diagnostic définitif de guérison ne pourra être fait que post mortem.

Et les autres ? Les très nombreux toxicomanes stabilisés sous traitement de substitution ?

Ils prennent encore un médicament, donc ils sont pharmacodépendants, mais ne sont plus toxicomanes. 

Rappelons que les médicaments de substitution, pris convenablement, ne provoquent aucun effet psychotrope (au-delà de l’effet opiacé de substitution attendu). Alors pourquoi ne pas les considérer comme guéris ?

S’ils étaient vraiment guéris, ils auraient arrêté tout traitement ?

Pas si sûr... peut-être que c'est justement parce qu'ils se sentent guéris qu'ils n'éprouvent pas le besoin de changer quoi que ce soit. D'ailleurs, il suffit parfois de le leur dire pour qu'ils arrêtent leur traitement. 

Ils étaient guéris mais ne le savaient pas, ou bien ils préfèrent conserver par habitude ou par appréhension un traitement à dose réduite. Pas très important, la vie est ailleurs, nous savons tous ça. Ne soyons pas plus toxicomane que les toxicomanes!

Il y a quand même des irréductibles !

Effectivement, sur d'autres, le temps ne semble pas avoir de prise.

Ils font n'importe quoi, cumulent toutes les galères, mettent tout le monde en échec, ils le paient cher mais ne veulent pas avancer d'un pouce.

C'est incompréhensible !

Sauf si l'on se rapporte à la définition étymologique de la guérison qui a deux versants. Dans celui qu'on emploie couramment, la guérison est apportée de l'extérieur par le médecin, l'autre désigne l'activité spontanée d'un individu pour se protéger (se guarir) se cacher (dans une guérite) ou s'enfuir (à la guarite !). Parmi ces modes de guérison, la maladie occupe une bonne place, surtout la maladie mentale et la toxicomanie une place de choix. 

C'est pour cela qu'il existe des jeunes gens (ou moins jeunes) inexpugnablement retranchés dans la toxicomanie : c'est leur mode de guérison. Ils vont sur les lieux de deal comme on va à l'hôpital de jour, au bureau, au marché ou au club du 3ème âge. Souvent, ils cumulent de tels handicaps qu'on ne peut pas leur proposer grand chose et qu'il est toujours risqué de perturber leur équilibre précaire. Ils s'amélioreront spontanément vers l'âge de la retraite, libérés de l'injonction de « faire quelque-chose de leur vie ».

Quelles sont les répercussions sur la famille ?

Quand l'alcoolisme ou la drogue sont présents dans une famille, personne ne peut faire comme si de rien n'était. Personne ne peut se comporter normalement. Normalement n'existe plus. Nous sommes au théâtre, l'alcool, la drogue ont écrit le scenario. Pour l'entourage, le nombre de rôles possibles est limité : persécuteur, persécuté, gendarme, complice, protecteur, associé. Dans la famille de l'alcoolique, l'alcool a tout inondé, tout le monde est alcoolisé. 

Dans la famille du toxicomane, tout le monde est intoxiqué. Dans ce scénario le médecin n'est pas oublié. Quelques rôles lui sont réservés : sauveur, arbitre, épouvantail, entrepreneur moral, redresseur de tort. Mais, il a affaire à plus fort que lui, pris dans les enjeux familiaux, il deviendra souvent, une marionnette cynique ou un otage accablé. Il subit plus qu'il n'agit : les addictions sont des maladies contagieuses.

Alors, le médecin n’y peut rien ?

Si le médecin peut guérir un malade, qu'il le guérisse ! S'il n'a pas ce pouvoir, il doit renoncer. Il n'a pas le droit de promettre ce qu'il ne pourra tenir. Pour le médecin, c'est la fin du monde, pour le malade, c'est le début. Il va découvrir qu'il a le pouvoir de guérir. Pouvoir dont il ne veut pas pour l'instant. Ce serait plus commode que le médecin s'en charge mais, justement, soigner c'est tenter de « rendre aux patients un pouvoir qu'ils veulent qu'on leur prenne ». C'est tracer au cordeau la frontière entre ce qui revient aux patients et ce qui revient au médecin, séparer inlassablement le tien du mien, éviter l'abus autant que le rejet.

Cette position professionnelle serait facile à tenir si les addictions n'étaient pas à l'image des trous noirs atmosphériques, d'une telle densité qu'elles peuvent absorber tout ce qui s'en approche. Leur champ de gravitation émotionnel est assez puissant pour avaler n'importe quel thérapeute armé de sa seule bonne volonté.

Pourtant, tenir une position professionnelle est la condition de l'efficacité. C'est aussi une question d'éthique et si ce n’est la garantie de sauver tous les toxicomanes, au moins pourra-t-elle sauver... le médecin.

Les addictions ne datent pourtant pas d'hier. L'opium, le khat, l'alcool ont provoqué des guerres, ruiné des empires, détruit des populations sans que la médecine ne s'en émeuve plus que cela. La situation est bien moins dramatique aujourd'hui. Alors pourquoi cette mobilisation de la médecine ?

Les « addictions », autrefois nommées « passions » relevaient d'un traitement social : politique, philosophique ou religieux. Mais la médecine a fait de tels progrès que plus personne n'est en bonne santé. La découverte d'une « biologie des passions », pour ne parler que de l'ouvrage le plus connu et de la dopamine a versé les « passions » dans l'escarcelle de la science.

Passion du jeu, du sexe, du travail, des drogues. Ce n'est pas une épidémie d'addiction, c'est une  épidémie de médecine. Comme dirait quelqu'un, la médecine, c'est la rencontre entre une personnalité, une profession et un moment socio-culturel !

Vous êtes partisan du sevrage ou de la maintenance ?

Une guerre picrocholine a longtemps opposé les gros-boutistes, tenants du sevrage qui ne le concevaient que définitif, aux petits-boutistes (qui l’ont finalement emporté) partisans de la maintenance qui ne l'envisagent qu'à vie. Opinions aussi tranchées que régulièrement démenties par l'expérience.

Il faudrait s'en tenir à une position plus professionnelle, en l'occurrence celle du jardinier.

Le jardinier prépare la terre, arrose, soigne ses plantes, les surveille, les protège, les traite parfois, place éventuellement un tuteur et s'en tient là.

Il est patient et sûr de lui, il sait que ses plantes finiront par pousser, s'il fait ce qu'il faut, seulement ce qu'il faut. Si les médecins avaient la même expérience de la nature, ils sauraient que les toxicomanes aussi finissent par pousser. Un gland, c'est le début d'un chêne, toutes les raisons d'être optimiste... je suis partisan du jardinage.

Vous êtes optimiste ?

Oui ! Pour une bonne raison : ils s’en sortent tous, ce n'est qu'une question de temps. Il n'y a pas plus de vieux toxicomanes que de vieux trapézistes. C’est un métier de jeune, trop dur pour un vieux. Si certains restent parfois dans le cirque, cette grande famille, c'est pour faire les clowns, pas de la haute voltige.

Je vais vous raconter une histoire :

Lucien est un vieux, très vieux clown de 93 ans. Il vient tous les mois chercher sa méthadone chez son jardinier. Celui-ci, par égard pour les vieilles jambes de son patient, a pris des libertés avec la législation en lui prescrivant le traitement pour le mois au lieu des 14 jours autorisés. Lucien est un brave type. Veuf, il a élevé seul deux turbulents, mais néanmoins affectueux, garnements qui lui en ont fait voir de toutes les couleurs.

Il y a 13 ans, pour les 80 ans de leur père, les deux frangins alors quinquagénaires firent une petite fête au cours de laquelle Lucien, avec le champagne, siffla la méthadone de ses rejetons et, n'eut été leur expérience et la rapidité des secours, le vieux aurait passé l'arme à gauche. Les fistons eurent très peur et dés lors ne touchèrent plus aucun produit et prirent grand soin de leur vieux père. C'est une belle histoire et un acte héroïque de transmission mais une question angoisse le médecin : « Lucien va-t-il s'en sortir ? ».

 

Docteur Jacques Barsony, médecin généraliste. Président Association Passages - PRA 31. Auteur de « Lettre ouverte aux drogués et aux autres s’il en reste » - Ed JBZ