Des scientifiques du Royaume-Uni affirment avoir développé un test sanguin capable de diagnostiquer l’encéphalomyélite myalgique/syndrome de fatigue chronique (EM/SFC) avec une précision de 96 %, le premier du genre.
Pour beaucoup de personnes vivant avec cette maladie débilitante, ce sera une nouvelle passionnante.
Bien qu’elle touche des millions de personnes dans le monde, cette maladie reste mal comprise. Elle se caractérise par une fatigue persistante qui ne s’améliore pas avec le repos et par un malaise post-effort, une aggravation des symptômes après une activité physique ou mentale, même mineure.
Pourtant, sans test fiable, de nombreuses personnes attendent des années avant d’obtenir un diagnostic. Cela dépend généralement des symptômes répondant à certains critères cliniques. Mais les critères de diagnostic peuvent être controversés car ils varient à travers le monde et beaucoup sont obsolètes.
Un test sanguin précis pourrait changer la donne en matière de diagnostic.
Alors, à quel point devrions-nous être excités ? Voici ce que nous savons.
Comment fonctionne le diagnostic sans test
Actuellement, vous ne pouvez recevoir un diagnostic que si vous ressentez une fatigue invalidante – l’un des symptômes clés selon la plupart des critères cliniques – depuis au moins six mois, accompagnée d’un malaise post-effort.
Mais les personnes atteintes de cette maladie présentent souvent un large éventail d’autres symptômes, notamment des maux de tête, des douleurs musculaires ou articulaires, des troubles du sommeil, des étourdissements, une accélération du rythme cardiaque et des problèmes de mémoire, de réflexion et de prise de décision.
Ainsi, les cliniciens doivent également exclure d’autres affections dont les symptômes se chevauchent.
Cela signifie que le diagnostic repose en grande partie sur les connaissances des cliniciens en matière d’EM/SFC et sur leur volonté d’écouter l’historique complexe des symptômes du patient. Ce processus peut prendre des années et le retard du diagnostic a de réelles conséquences.
Les données suggèrent qu’une intervention précoce est la clé du rétablissement. Le repos pendant les premiers stades de la maladie entraîne probablement de meilleurs résultats à long terme, comme cela a été suggéré pour la maladie cliniquement similaire, la longue COVID.
Une étude a montré qu’un diagnostic tardif d’EM/SFC était lié à de moins bons résultats, ce qui signifie que la guérison était moins probable et que le risque de développer des symptômes plus graves augmentait.
Sans diagnostic définitif, les patients sont régulièrement confrontés à l’incrédulité quant à leur maladie et ont un accès limité à l’information, aux services de santé et aux prestations médicales.
Des retards fréquents dans le diagnostic peuvent contribuer au faible taux de guérison de la maladie, estimé entre 1 et 10 % seulement.
Ce que la nouvelle étude a examiné
Pour développer un test de diagnostic, la nouvelle étude a identifié des biomarqueurs qui pourraient être spécifiques aux personnes atteintes de cette maladie.
Dans ce cas, les biomarqueurs concernent l’épigénétique, c’est-à-dire les changements dans la structure des chromosomes d’une personne, influençant les gènes qui peuvent être activés ou désactivés.
Ces changements se produisent en raison d’influences environnementales telles que le stress, les infections et l’exercice. Ainsi, lorsqu’une personne développe l’EM/SFC, la maladie peut modifier la structure de ses chromosomes, mais jusqu’à présent, les chercheurs n’avaient pas identifié à quoi cela ressemblerait.
Les chercheurs ont examiné des échantillons de sang provenant de personnes dont ils savaient qu’elles souffraient d’EM/SFC et ont identifié environ 200 biomarqueurs de ce type. Ces changements formaient une « signature » biologique distincte qui n’était pas présente dans le sang des participants en bonne santé du groupe de comparaison.
Cette signature était très précise pour identifier correctement quels échantillons provenaient de personnes atteintes de la maladie et lesquels provenaient du groupe de comparaison.
Selon les chercheurs, la sensibilité du test était de 92 %, c’est-à-dire la probabilité qu’un résultat positif soit obtenu lorsqu’une personne souffre de la maladie. Il avait une spécificité de 98 %, ce qui signifie la probabilité qu’il puisse exclure les cas négatifs.
Ceci combiné à une précision diagnostique globale de 96 %.
Alors, est-ce une avancée ?
Cette recherche est prometteuse, mais elle n’en est qu’à ses débuts. Il s’agissait d’une étude de validation de principe, c’est-à-dire d’une recherche à petite échelle visant à tester dans un premier temps si une idée pouvait fonctionner.
Dans ce cas, les chercheurs ont exploré l’idée selon laquelle les changements structurels dans les chromosomes pourraient être utilisés comme biomarqueurs de l’EM/SFC. Leurs résultats suggèrent que c’est possible.
Il y avait cependant plusieurs limites. L’étude a porté sur un nombre relativement restreint de personnes : 47 participants atteints d’EM/SFC sévère et 61 dans le groupe « témoin » en bonne santé.
Le groupe ME/CFS comptait plus de femmes et ses participants étaient si gravement touchés qu’ils étaient confinés à la maison. Ils avaient donc vraisemblablement des niveaux d’activité inférieurs à ceux du groupe témoin.
Nous savons que le sexe et le niveau d’activité d’une personne peuvent influencer ces changements chromosomiques, cela peut donc avoir affecté les résultats.
Pour développer un test de diagnostic pouvant être largement utilisé, plusieurs étapes cruciales restent à franchir.
Il faut déterminer dans quelle mesure le sexe et le niveau d’exercice d’une personne influencent ces biomarqueurs. Les biomarqueurs devront également être validés dans des groupes plus larges et plus diversifiés, qui comprennent des personnes présentant des symptômes moins nombreux et plus graves que dans cette étude et celles issues de milieux différents.
Pour confirmer si ces biomarqueurs sont réellement spécifiques à l’EM/SFC, ils doivent être comparés à d’autres affections partageant des symptômes similaires, comme la sclérose en plaques et la fibromyalgie.
Enfin, il est également important qu’un test, s’il est développé, soit abordable et accessible.
L’EM/SFC reste une maladie gravement sous-diagnostiquée, et l’absence de test fiable continue de retarder les soins et d’aggraver les résultats. L’identification de biomarqueurs, comme l’objectif de cette étude, est une première étape prometteuse.