Retour à Penser ensemble les prises en charge
Retour par MOTS CLÉS :
Grossesse ; Méthadone ; Parentalité


EXCRÉTION LACTÉE DE MÉTHADONE
Methadone levels in human milk. J.J. Mc Carthy, B.L. Posey.
JHL 2000 ; 16 (2) : 115-120.

Le Flyer HS N°1, juin 2003.
 
Une mère sous méthadone peut-elle allaiter ?

La méthadone est le principal médicament utilisé pour la substitution des toxicomanes aux opiacés. Une femme enceinte traitée par méthadone pourra souhaiter allaiter, mais on la découragera souvent de le faire en raison du passage de la méthadone dans le lait. Six études ont été publiées sur l’excrétion lactée de la méthadone, et aucune ne concluait que l’allaitement devait être déconseillé aux mères prenant de la méthadone. Toutefois, les données existantes sont encore restreintes. Cette étude avait pour objectif de suivre l’excrétion lactée de la méthadone chez des mères suivies par un service médical d’aide aux toxicomanes.

Les femmes enceintes et allaitantes enrôlées dans ce programme de substitution doivent assister à des sessions d’information toutes les semaines pendant lesquelles l’allaitement est abordé.

 

L’allaitement est conseillé aux mères qui suivent correctement leur traitement, ne consomment ni alcool ni autres drogues, sont séronégatives pour le VIH et ne prennent pas de médicaments contre-indiqués pendant l’allaitement. L’hépatite C, très courante chez ces femmes, n’est pas considérée comme une contre-indication.

Les femmes qui ont choisi d’allaiter (n = 8) ont été encouragées à donner des échantillons de leur lait pour dosage de la méthadone. Quatorze échantillons de lait ont été recueillis, entre 3 jours et 6 mois post-partum, 1 à 8 heures après la prise de méthadone.

Le taux sérique de méthadone des mères était régulièrement recherché dans le cadre du suivi assuré par le service. Ce suivi du taux sérique était particulièrement étroit chez les mères prenant plus de 100 mg/jour de méthadone.

Retour en haut de page
Les résultats de l'étude

Sept des 8 femmes suivies ont commencé le traitement par la méthadone entre 3 et 5 mois de grossesse, la dernière femme étant tombée enceinte alors qu’elle était déjà sous traitement. La posologie de méthadone était en moyenne de 102 ± 42 mg/jour (25 à 180 mg/jour). Le taux lacté de méthadone était en moyenne de 95 ± 60 µg/l (27 à 260 µg/l) ; il n’était pas corrélé à la posologie maternelle.

On sait toutefois que le taux lacté de méthadone est fonction du moment de la journée et du taux lacté de lipides. Il était donc impossible de déduire le niveau d’exposition de chaque enfant pris individuellement à partir des taux lactés retrouvés.

Toutefois, en prenant le taux moyen retrouvé (95 µg/l), on pouvait estimer que le nourrisson absorbait 0,05 mg/jour de méthadone (pour uneconsommation de 475 ml/jour de lait), cette absorption étant 2 fois plus élevée chez un enfant âgé de 4 à 6 mois. La durée totale d’allaitement chez ces mères a été de 2,5 à 21 mois. Aucun enfant n’a présenté d’effet secondaire de quelque ordre que ce soit.

 
Les posologies de méthadone des mères suivies dans cette étude étaient dans l’ensemble plus élevées que celles des mères suivies dans les études précédemment publiées, où la posologie la plus élevée était de 80 mg/jour. Les taux sériques de méthadone étaient dans la moyenne thérapeutique et les taux lactés de méthadone n’étaient pas significativement plus élevés que ceux qui ont été retrouvés dans les autres études. Le taux lacté de méthadone le plus élevé jamais constaté dans une étude sur le sujet était de 570 µg/l. En partant de ce taux, un nourrisson absorberait en moyenne 0,27 mg/jour, ce qui correspond à la posologie pédiatrique la plus basse, qui est peu susceptible de constituer un problème pour l’enfant. Encore faut-il noter que ce taux lacté très élevé a été constaté chez une mère dont le taux sérique de méthadone était de 1 660 g/l, ce qui est très supérieur au taux thérapeutique et suggère un surdosage important. Dans cette étude, la mère qui avait la posologie la plus élevée (180 mg/jour) était aussi celle dont le taux lacté de méthadone était le plus bas (32 g/l) ; elle a allaité pendant 21 mois.
Retour en haut de page
Conclusions

Les résultats de cette étude confirment ceux des études précédentes ; avec les posologies habituellement prescrites, les taux lactés de méthadone sont la plupart du temps trop faibles pour induire un taux sérique significatif de méthadone chez l’enfant allaité. De plus, lorsque l’enfant a été exposé à la méthadone in utero, il la tolère beaucoup mieux et l’élimine plus efficacement. Il n’y a aucune raison de déconseiller l’allaitement à une mère traitée par méthadone.

La principale et plus efficace mesure de surveillance semble être de suivre régulièrement le taux sérique de méthadone chez la mère, afin de vérifier qu’il reste dans les limites thérapeutiques, ce qui élimine plus ou moins totalement le risque d’une excrétion lactée très importante.

 
Avec l’aimable autorisation de la LLL France (La Leche League France) www.lllfrance.org

Bibliographie :

Neonatal abstinence syndrom following abrupt cessation of breastfeeding. Malpas TJ, Darlow BA. N Z Med Journal, 1999, jan 22; 112(1080): 12-3

Methadone distribution and excretion into breast milk of clients in a methadone maintenance programme. Wojnar-Horton RE, Kristensen JH, Yapp P, Ilett KF. Br J Clin Pharmacol 1997. Dec; 44(6): 543-7

Methadone level in breast milk. Geraghty B, Graham EA, Logan B, Weiss EL. J Hum Lact 1997; 13: 227-230

.
Retour en haut de page